Dans nos sociétés africaines, le mariage précoce est toujours d’actualité. Au Burkina Faso, pays des Hommes intègres, cette pratique quoi que l’on dise perdure et aucune communauté n’y échappe.
Plus de 52% des femmes sont mariées avant l’âge de 18 ans et 10% avant l’âge de 15 ans, selon l’UNICEF. A l’évocation du terme « mariage précoce » ou encore « mariage d’enfants », la plupart des personnes ont tendance à s’attrister de cette situation que vivent certaines jeunes filles. Eh non, sachez que cette appellation n’est pas propre aux jeunes filles ; elle inclut également les jeunes-hommes. Le vocable désigne donc toute victime (homme et femme) d’une union conjugale qui ne respecte pas les conditions d’âge prévue par la loi. Le Code des personnes et de la famille (CPF) en son article 238 est clair, le mariage peut être célébré entre un homme âgé de plus de 20 ans et une femme de plus de 17 ans, sauf dispense d’âge accordée pour motif grave par le tribunal civil. Cette dispense d’âge ne peut être accordée en aucun cas pour un homme ayant moins de 18 ans et une femme ayant moins de 15 ans.
L’interprétation fait du tableau de l’évolution de l’effectif des cas de mariages précoces par région et selon le sexe pendant les cinq dernières années (2013-2017), contenu dans l’annuaire statistique du ministère de la femme, de la solidarité nationale, de la famille et de l’action humanitaire, édition 2018, classe la région de l’Est première avec 334 cas dont 325 femmes et 9 hommes. Elle est suivie du Centre-nord avec 114 cas dont 110 femmes et 4 hommes. La Boucle du mouhoun est troisième avec 103 cas dont 95 femmes et 8 hommes. Quatrième, le Sahel, compte 91 cas dont 89 femmes et 2 hommes. Les Hauts-bassins arrivent à la cinquième place avec 62 cas dont 58 femmes et 4 hommes. La sixième place est réservée au Centre-ouest qui comptabilise 50 cas dont 41 femmes et 9 hommes. Le Sud-ouest est septième avec 46 cas dont 38 femmes et 8 hommes. Le Centre-est, huitième, totalise 43 cas dont 42 femmes et 1 homme. Le Centre-sud est neuvième avec 28 cas dont 26 femmes et 2 hommes. Dixième et dixième ex éco, le Centre et le Nord affiche 27 cas ; la première région compte 23 femmes et 4 hommes tandis que la seconde, 27 femmes et aucun homme. Quinze (15) femmes et 6 hommes soit 21 cas, c’est le total que présentent les Cascades pour occuper la douzième place. Le Plateau-central ferme la marche avec 16 cas dont 16 femmes et aucun homme. Soit un total de 975 cas au plan national (918 filles, 57 garçons).
D’énormes conséquences résultent de ces unions sans consentement et non règlementaires. De celles-ci, des violences sexuelles et un risque de complication élevé à l’accouchement pour les jeunes filles. En effet, du fait de la pratique brusque de l’acte sexuel et de la manière dont il est le plus souvent pratiqué (avec violence), le jeune corps des adolescents est exposé à pas mal de maladies et plus tard des séquelles. L’avenir du jeune garçon et plus encore pour la jeune fille peut également être hypothéqué à la manière dont l’organisme répondra à toute cette violence. Cela dit, rien ne présage d’un avenir certain à celui-là ou celle-là qui est confronté à pareille situation. Et, dans la majeure partie des cas, la souffrance, la soumission totale, la crainte et la peur, la tristesse bref, le sentiment d’avoir raté sa vie sur terre, d’avoir été abandonné par le créateur de l’Univers (Dieu) est le partage quotidien desdits jeunes qui parfois préfèrent atteindre le point de non-retour (le suicide…).
Pour rappel, en 2015, le Burkina Faso a adopté une stratégie nationale visant à faire reculer de 20% le mariage précoce d’ici 2025. Il a donc pour obligation, au titre du droit international, d’agir immédiatement et de façon durable pour éliminer le mariage d’enfants et les nombreuses atteintes aux droits fondamentaux des filles qu’il entraine. Le gouvernement doit jouer sa partition vis-à-vis de cette norme internationale et pour sauver les nombreux jeunes qui sont chaque année victimes de ce fléau.
Alice Kouaman/Zonou
Latribunedufaso.net